Rien n'abattra jamais le capitalisme !
En 1887, un éminent théoricien du socialisme, Karl Pearson, écrivait : " Les socialistes doivent inculquer le principe que quiconque offense l'Etat mérite d'être pendu à la lanterne la plus proche, sans autre forme de procès ". Comme la magistralement montré Orwell dans le roman 1984, l'ennemi, qu'on le nomme à l'intérieur le juif ou le koulak, ou, à l'extérieur, le "grand Satan " ou les firmes multinationales, est l'instrument indispensable du totalitarisme.
Dans la France d'aujourd'hui, l'ennemi intérieur qui déchaîne toutes les passions vengeresses, c'est le libéral. Parce qu'il ne tolère ni la liberté individuelle, ni les institutions démocratiques, le totalitarisme doit toujours trouver un bouc émissaire, un ennemi qui permet de mobiliser les foules (et de coaliser les non et autre ni-ni) en neutralisant les aspirations individuelles perçues comme des réactions égoïstes et bourgeoises.
Dans l'Allemagne hitlérienne (nationaliste et socialiste), les juifs étaient aussi pourchassés en tant que représentants caractéristiques du capitalisme (les sbires de la finance mondiale) et, à ce titre, symptôme intolérable du péché libéral. Il se trouve en effet qu'une grande partie de la population allemande méprisait les occupations marchandes et les laissait volontiers aux juifs en leur interdisant du même coup les professions à statuts.
Rappelons-nous les attentats du World Trade Center et du Pentagone. Au delà du terrible drame humain qu'a représenté cet événement tragique et historique, il est à noter que la disparition des fameux symboles du capitalisme mondial n'a pas mis à terre l'économie américaine. Loin de là ! Hausse des dépenses des ménages, retour de la confiance des consommateurs et reprise de l'investissement et de l'activité : l'économie américaine enregistrait après ces événements une série de bonnes nouvelles.
Dans une économie totalement planifiée, où il existe un centre de commandement et une base vouée à exécuter les injonctions du centre sur le modèle de l'organisation des armées, un tel acte terroriste aurait été fatal à l'économie toute entière. Pour mettre en déroute une armée, il suffit de lui couper la tête pensante en frappant l'état-major. Rien de tel dans une économie de marché qui n'obéit à aucune tête pensante et unique, qui n'est soumise au plan d'aucun quartier général. Les conférenciers à Davos peuvent bien disparaître du jour au lendemain sous l'effet d'une catastrophe tragique ou d'un attentat terrible, l'économie mondiale ne s'arrêtera pas de tourner. Les délégations étatiques peuvent bien chroniquement se fâcher et s'opposer dans le cadre des négociations biaisées de l'O.M.C., cela n'empêchera nullement le commerce international de se déployer. Car il ne faut pas confondre les symboles et la réalité comme le font les terroristes, les casseurs illettrés et certains média qui se complaisent trop facilement dans le terrorisme intellectuel. L'économie de marché n'est pilotée par personne et c'est heureux (bien que la plupart des politiques le regrette). Il n'y a pas de centre de commandement et de base exécutante et c'est bien cela qui fait sa force, sa souplesse et son dynamisme.
Même si c'est pourtant le modèle d'organisation de chaque entreprise considérée individuellement, l'économie dans son ensemble ne peut s'analyser comme une seule entreprise. Chaque entreprise est comme une cellule qui compose le tissu économique et social de la manière que les cellules vivantes tissent la peau du corps humain. Chaque cellule considérée isolément peut bien être fragile et disparaître un jour, l'ensemble est dynamique, malléable et vivant.
Jean-Louis CACCOMO, le 10 avril 2006