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Exception cuculturelle


 

La libre expression de chacun brise l’instauration de canons uniformisés de l’art, de la science, de la créativité en général. Ainsi, le libéralisme se voulant chantre de la liberté individuelle, ne se mêlant ni du développement scientifique ni de l’art, n’est à même de déterminer une direction à la création.

Le « laissez-faire » permet donc à chaque composante de la créativité de se renforcer mutuellement : l’avancé technologique engendre une plus grande imagination esthétique, la révolution des mondes virtuels n’est-elle pas un exemple de couplage réussi entre la science et l’art ? Popper en aurait rajouté en faisant de l’intersubjectivité et de la réfutation possible de tout dogme, le moteur des avancées scientifiques.

 

On reconnaît facilement ceux qui considèrent les limites du laissez-faire en matière de créativité. Leur discours ronronne comme une mécanique bien huilée : « en voulant la diversité, en refusant d’intervenir dans la création, de décréter l’exception culturelle, on détruit cette diversité au nom de l’américanisation de notre planète ».

 

Mais vouloir défendre la création nationale c’est porter atteinte au libéralisme créatif. C’est mettre en œuvre un protectionnisme considérant « l’invasion de la création étrangère » comme impérialiste. On déclare alors la guerre à l’audience ou audimat au nom d’une création étriquée, ce « on » c’est l’Etat au moyen de ses émanations qui se croient investies du bon goût, du « mieux-disant culturel » alors que les masses n’ont pas de goût c’est bien connu. Il faudra donc leur imposer celui des productions bien de chez nous, subventionnées par ceux qui les boudent. La bonne culture nationale est nécessairement supérieure à cette sous culture US à base de rock, de soap operas, de reality shows … (depuis que j’ai écrit cela on se rend compte de l’adaptation de la production française aux goûts dits vulgaires).

 

Il n’y a pourtant aucune raison de faire échapper la création au couperet de son audience. Mais il semblerait que de nos jours faire de l’audience ce n’est que susciter les bas instincts, c’est faire de la « merde ». Alors on en appelle au ministère de la culture, pour soustraire la créativité au marché, on subventionne et accorde des avances sur recettes à des spectacles lors desquels le public s’ennuie à mourir ou s’extasie de crainte de passer pour un idiot (j’ai trouvé un exemple formidable de ce dernier constat dans « La source vive » d’Ayn Rand). Comme le disait le dessinateur Lauzier : « Je n’invente rien. J’ai assisté à une pièce où un couple dans un lit se parlait pendant une heure de manière volontairement inaudible. Que l’Etat aide la culture, c’est bien, mais que quelques tomates remettent l’auteur sur ses pieds, c’est pas mal non plus ! » Et puis on subventionne surtout les courtisans, on construit l’art à coups d’opéras bastille dont on réserve la direction à des amis, on pique le canal de la chaîne championne de l’audimat (traduisez la sous-culture de la 5 devenu cinquième et Arte).

 

 

 Rapport ADEL, 12 décembre 1990


 

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