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Qu'est ce qui est utile ?
Un petit cours à l'intention d'Alternatives Économiques Cela peut servir des fois
« Alternatives Économiques » comme tout magazine fait de papier
glacé et dont le contact est agréable. Il me fait d’ailleurs usage
d’autant plus facilement que le service des abonnements m’en envoie
gratuitement un certain nombre de numéros, tout en me proposant des conditions
imbattables si j’arrive à abonner aussi mes élèves. Bon
d’accord je les en dispense à leur grand soulagement, mais tout de même je
laisse analyser quelques textes de cette feuille illustrant abondamment les
manuels d’économie. Quelquefois j’ajouterais bien des articles plus récents,
mais je fais très attention au copyright. C’est vrai ces œuvres de grands économistes
journalistes sont si précieuses, si originales, qu’il est bien normal d’en
payer le prix afin que ces illustres esprits là perpétuent leur tâche de
grande réformation de cette science un temps abandonnée à la barbarie néolibérale. Ouarf, excusez moi, je ne pense pas que cela se soit vu mais j’ai du quitter ce clavier un moment pour une manifestation irrationnelle d’hilarité (pardonne moi Ayn pour ce côté quelques fois irrationnel ;-)).
L'hôpital avant Nice People
Donc
j’en étais à étudier une tirade intéressante de Denis Clerc, dans le numéro
de juin 2003 consacré au dossier sur la réforme du RMI. En gros, il évoque le
Revenu Minimum d’Activité qui permettrait d’aider des emplois non seulement
dans le secteur non marchand - comme c’était le cas pour les contrats
emploi-solidarité - mais aussi dans le secteur marchand.
Là dessus il précise vite pour ceux qui auraient pu le croire « qu’il
ne s’agit pas pour autant d’affirmer, comme le font les libéraux, que ce
seront donc de «vrais » emplois, alors que les CES seraient de « faux »
emplois : comme si les besoins qui poussent les gens à aller à l’hôpital
public ou dans une association de lutte contre les violences conjugales (une
prémonition sur son pote d’idéologie Bertrand Cantat ?) étaient
moins importants et fondamentaux que ceux qui les poussent à aller acheter des
grilles de PMU ou à s’abonner à la diffusion en continu de Nice People ! » On
retient là aussi le point d’exclamation qui doit marquer l’indignation du
bonhomme. Pas convaincu de la notion
française de la propriété intellectuelle, je transforme tout de même le
texte pour le livrer à la réflexion de mes étudiants de BTS. Cela devient
donc : « Il est faux de considérer que les emplois publics seraient
inutiles, en réalité on peut estimer que les besoins satisfaits par
l’hospitalisation publique sont plus importants que ceux liés à
l’abonnement à une chaîne de diffusion en continu de Nice People. » Et voilà que mes étudiants critiquent par écrit, que mon Quentin, admirateur avoué de l’émission « Nice People » et de la fameuse Séréna, me pond un devoir cinglant que je cite en substance dans ses points les plus saillants : L'utilité,
une notion subjective et quantifiable « L’auteur de
l’article juge en fonction de ce qu’il considère lui comme utile, il considère
que ses besoins à lui doivent être les besoins de tous, c’est un dictateur
et je ne permettrai jamais plus à personne de juger de ce que je trouve utile ».
Ca c’est le cri du cœur, mais Quentin a bien compris que les besoins
sont subjectifs et l’utilité que nous ressentons à utiliser ce qui satisfait
nos besoin est donc tout aussi subjective. En conséquence dire que ceci est
plus utile que cela correspond à une analyse de ses besoins personnels, analyse
pas forcément transposable au reste de l’humanité, même si l’on peut
supposer qu’elle le soit dans le cas cité. Mais Quentin continue son
analyse : « En plus le problème est très mal posé,
si j’étais gravement malade je préfèrerais consacrer mon budget à
me soigner plutôt qu’à regarder Nice People, je pense que ce serait pareil
pour tout le monde. Mais alors dans ce cas on verrait facilement ce qui est
considéré comme le plus utile au niveau d’un ensemble de personnes tout ça
grâce au système des prix. » . Bien raisonné, le système des prix
permet de confronter des besoins différents lors d’un échange, effectivement
lorsque le besoin que nous ressentons pour un bien ou un service est supérieur
à son prix, nous choisissons de l’acquérir. Mais pour l’acquérir faut il
encore que quelqu’un nous le propose et pour que ceci arrive, il faut que le
prix obtenu de ce bien ou service soit supérieur à l’utilité ressentie pour
ce bien par son offreur. Le prix se fixe donc à un niveau médian entre des
besoins subjectifs tous différents. Les
sévices publics désutile ? Non, on ne conclut pas
encore : « Le problème des services publics c’est qu’ils sont décidés
en dehors des besoins véritablement exprimés par la population mais en
fonction des intérêts de groupes organisés qui n’en sont pas forcément
consommateurs. En fait les services non marchands
sont ressentis comme gratuits puisque ceux qui en paient le prix n’ont pas le
choix de ne pas payer. Ces services non marchands pourront être consommés sans
limitation sauf contrôle administratif ou files d’attente, ils seront donc
proposés et créeront des emplois publics toujours plus nombreux, maintenant ce
qu’on sait seulement est que leur utilité est supérieure à 0, mais quand on
sait ce que ça nous coûte en impôts et taxes, je dirais que globalement
c’est désutile. Enfin pour moi. » Une bonne note pour Quentin,
comment juger de l’utilité en dehors d’un marché libre ? Les services non marchands
peuvent être utilisés aussi longtemps que leur utilité est supérieure au coût
d’opportunité de leur consommation auquel on peut ajouter la participation éventuellement
demandée pour en jouir. Il en découle évidemment une surconsommation qui
d’apparence légitime le rôle desdits services. Tout
ce qui est utile trouve sa place sur un marché Cependant un service non
marchand s’il se révèle correspondre véritablement à des besoins
fondamentaux et pas forcément vitaux d’ailleurs, n’a plus besoin de rester
service non marchand. Les acteurs de ce service trouveront alors la juste rémunération
de leur utilité à travers un prix de marché qui éteindra toute pénurie ou
surproduction. On comprendra donc que seuls
ceux qui désirent imposer leur échelle de préférence continueront
d’affirmer que tel service non marchand est plus utile qu’un bien marchand. C’est là une des bases premières de l’économie et Quentin, élève de première année de BTS, peut déjà former à l’économie Denis Clerc et ceux qui se rémunèrent en mâchant le boulot de profs un peu fainéants et incultes en la matière qu’ils enseignent. Xavier PREGENTIL, le 16 octobre 2003
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