L'enfer rouge de la Corée du Nord

 

 

Si la Corée du Nord est sur le point de devenir une puissance nucléaire, elle est aussi certainement la dictature la plus effroyable et la plus meurtrière du monde dans un des pays les plus pauvres, sinon le plus pauvre, ravagé par les aberrations du communisme.

 

 

La famine meurtrière

 

En Corée du Nord, la famine a déjà fait entre 1,5 et 3 millions de morts, sur une population d'environ 22 millions d'habitants.
Les villages nord-coréens ressemblent souvent à un no man’s land, trop faibles pour travailler beaucoup des habitants se terrent ou désertent les campagnes pour trouver de la nourriture en ville, quant aux coopératives agricoles, elles ne produisent qu’à peine.

Les mines ne fonctionnent que sur le papier, n’ayant plus les moyens de payer les ouvriers et de toute façon pas suffisamment pour leur permettre de manger plus de 3 jours par mois.

Les usines ne tournent qu’au quart de leur capacité et leurs ouvriers non rémunérés, bravant la mort, démontent ce qu’ils peuvent des équipements afin de leur revendre à des contrebandiers chinois.

 

L’intensité de la famine a décru, mais on meurt encore de faim, de typhus, de dysenteries, de tuberculoses.

Faute de denrées alimentaires, l’ingestion de champignons quelquefois vénéneux ou de bouillies d’écorce empoisonne la population et créé de nouvelles pathologies.

De la vraie nourriture on en trouve pourtant, mais elle est conservée dans des entrepôts surveillés par les soldats. On en trouve également dans les coopératives agricoles, mais les récoltes y sont réquisitionnées et malheur à celui qui voudrait se servir, il sera alors fusillé en place publique pour l’exemple.

 

Si l’État centralise la nourriture, il ne parvient plus à gérer la pénurie.

Le système de distribution alimentaire de l’Etat, l’un des instruments du contrôle social, ne fonctionne plus, et chacun doit se débrouiller pour survivre.

L’échec du communisme est bien là et pour ne pas que la famine fasse davantage encore de ravages il a fait déporter une partie des citadins vers la campagne. Faute de résultats, le régime a dû accepter l’aide internationale, sud-coréenne le plus souvent et celle du Programme Alimentaire Mondial de l’ONU (qui nourrit 1 Nord-Coréen sur 3), mais aussi autoriser les marchés agricoles libres. Organisés quotidiennement dans les grands villages, ils permettent à ceux qui ont de l’argent de se nourrir.

 

Les militaires, piliers du régime

 

Entre la population et les 1 million de militaires du pays, l’espérance de survie n’est pas la même. Les rations alimentaires attribuées aux forces armées les mettent relativement à l’abri de la faim, les membres du parti unique ne craignent pas grand-chose non plus. Pourtant quelques militaires font aussi défection vers la Chine pour améliorer leur quotidien ou parce qu’ils n’y croient plus.

 

L’exode de la faim

 

Faute de pouvoir se nourrir les Nord Coréens fuient vers la Chine, en 1998 ils sont 400 000 personnes à avoir tenté l’aventure dont certains reviennent avec des vivres pour nourrir leur famille au risque de se faire abattre ou rançonner par les gardes-frontières.

 

Parmi les réfugiés on trouve aussi beaucoup d’enfants, orphelins ou dont la famille ne pouvait plus subvenir aux besoins. Ils se sont rassemblés en groupes vivant de la mendicité, quêtant un peu de nourriture sur les marchés de la Chine frontalière, se nourrissant de restes ou de détritus. Crasseux, souvent malades, rachitiques, ils évitent les coups de paysans irascibles, mais ils survivent tout de même mieux que dans l’enfer de la Corée du Nord.

Certains les prennent en pitié et les hébergent, des organisations humanitaires leur viennent aussi en aide, des missions chrétiennes se sont développées et leur apportent de quoi manger. Mais le régime nord-coréen n’apprécie pas ce camouflet et a déjà fait exécuter des missionnaires chrétiens en Corée du Nord. Le gouvernement chinois ne voit pas non plus d’un bon œil l’hébergement des réfugiés, il laisse aussi agir impunément des agents nord-coréens qui viennent kidnapper les enfants pour les renvoyer dans l’enfer communiste. Impunément car, bien souvent, ce sont les autorités chinoises qui expulsent.

 

Que deviennent les expulsés ?

 

Les réfugiés sont considérés par le régime comme des « fuyards ». Avant que le phénomène ne se massifie, les familles, dont quelques membres étaient partis, subissaient des peines de camp. Désormais ce n’est plus possible car chaque famille est touchée. Par contre les expulsés seront exécutés s’ils font partie des forces armées, les autres seront placés dans un centre d'interrogatoires. Là ils seront régulièrement passés à tabac et devront avouer les motifs de leur passage en Chine. Ils seront questionnés sur des « crimes politiques » éventuellement commis : ont-ils regardé ou écouté un programme sud-coréen ? Ont-ils parlé à des journalistes, critiqué le régime, parlé de la famine, fréquenté une église chrétienne ? Si une des réponses est oui alors ce sera le camp de concentration, sinon ce sera « seulement » 6 mois de camp de travail.

 

Les camps de concentration

 

Mais, quand on meurt de faim, que l’on voit ses enfants agoniser dans des conditions atroces faute de pouvoir les nourrir et les soigner, qu’a-t-on encore à perdre ?

Une mort moins terrible que celle subie dans les camps du régime.

 

Les camps les plus connus sont le camp n° 15 de Yodok, à 300 km au nord-est de Pyongyang, et le camp 22 de Hoeryung. Ils abritent chacun 30 000 à 50 000 détenus dont le crimes sont de nature « politique », ou d’avoir des parents « criminels politiques », ainsi des enfants de moins de 10 ans pourront y être internés.

En réalité le « criminel » lui-même ne sait pas trop de quoi on l’accuse, il peut tout aussi bien avoir été dénoncé par un voisin qui espère en retour une ration alimentaire plus importante.

 

Les prisonniers politiques sont divisés en deux : les « irrécupérables » qui n’en sortiront jamais, et les « récupérables ». Mais les uns comme les autres sont soumis à des brutalités, à des punitions sadiques, à des meurtres, les femmes y sont violées, leurs enfants tués à la naissance, elles seront aussi exécutées de façon abjecte si on les suspecte d’avoir eu des relations sexuelles dans l’enceinte du camp : “Les femmes meurent rarement paisiblement, explique Ahn Myong-chol, chauffeur au camp n° 13 d'Onsung puis au camp n° 22 de Hoeryung, dans la province du Nord-Hamyung, qui a demandé l'asile politique au Sud, le 13 octobre 1994. J'ai vu des femmes aux seins lacérés, les parties génitales défoncées par un manche de pelle, la nuque broyée à coups de marteau”... . Ceux qui cherchent à fuir seront pendus devant les autres prisonniers, lesquels devront ensuite lapider leurs cadavres.

Des expériences « biologiques » sont aussi conduites sur les détenus, il s’agit de tester la résistance à la faim ou aux diverses techniques de torture, ou encore aux gaz de combat.

 

Oui, il y a pire que de mourir de faim en Corée du Nord.

 

 

Sources :

- Pierre RIGOULOT, Un goulag si discret, 21 septembre 2004

- Philippe PONS, Le long fleuve de la faim, Le Monde, 27 avril 1999

 

 

 

1. Qu'est ce qu'un régime stalinien ? En connaissez-vous d'autres ?

Un régime stalinien est un régime communiste non réformé, il est fait référence ici aux réformes de Khrouchtchev et au rejet de la politique de terreur menée par Staline. En réalité comme le démontrent Raymond Aron les régimes totalitaires comme le fut l'URSS ne rompent pas avec la terreur et le refus de l'Etat de droit, ils ne sont pas réformables comme l'a montré l'échec de la Perestroïka en URSS. Le régime de Castro est aussi de ce type.

2. Quel type de système économique est en vigueur en Corée du Nord, en Corée du Sud, comparez les performances économiques de ces deux pays.

3. Comment peut-on expliquer la famine en Corée du Nord ?

Planification centralisée dont la priorité est donnée pour le secteur militaire (dont la fameuse bombe), croissance extensive épuisée, ...

Les cultures de subsistance ne permettent pas aux familles paysannes de nourrir leur famille, d'autant que celles-ci sont réquisitionnées notamment pour nourrir l'armée. L'armée constitue presque 5 % de la population et voit ses besoins alimentaires mieux satisfaits alors qu'elle ne contribue pas à la création des richesses dont elle profite.

4. Comment le régime a-t-il jusqu'à présent évité des émeutes et son renversement ?

La propagande (media, école) a fait ignorer qu'ailleurs dans le monde on vivait mieux, elle a désigné des bouc-émissaires (les pays capitalistes), caché que la survie alimentaire provenant des dons des gouvernements capitalistes (Etats-Unis, Canada, Europe, Japon). De plus le régime mobilise autour du mythe du chef et de la construction du socialisme, de la fierté nationale avec la bombe, du risque de guerre contre la Corée du Sud, les Etats-Unis, mais c'est surtout la terreur physique et la recherche perpétuelle de la nourriture qui donnent peu de prise à la contestation.

5. Rappeler ce qu'est le contrôle social à travers la phrase : "Le système de distribution alimentaire de l’Etat, l’un des instruments du contrôle social, ne fonctionne plus, et chacun doit se débrouiller pour survivre."

6. Peut-on dire que le capitalisme se développe en Corée du Nord ? Sous quelle forme ? A-t-il été institué par l'Etat ? Quel rôle remplit-il ?

Sous forme des marchés agricoles libres, l'Etat plus capable de faire marcher l'économie notamment en matière de fournitures en bien de consommation se trouve obligé à le tolérer bien qu'il en condamne le principe. Le capitalisme revient donc naturellement et est le seul moyen pour permettre la survie de la population.

7. Comment les Nord Coréens peuvent-ils se sortir de leur situation selon vous ?